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Point de la situation géopolitique de la Jordanie en 2015

.: le 16 juillet 2015

Marc-Henry Saillard, fait un ici un point géopolitique sur la Jordanie pour le site MEDEA. Après un bref retour sur ses origines histoiriques, il parle de ses ressources ainsi que de la situation politique intérieure, de la situation militaire. Puis il aborde la question l’économie de la monarchie hachémite, il conclut en pointant les défis à relever pour le Roi Abdallah II, dont le pays se trouve "dans l’oeil du cyclone".

L’état-major Jordanie a commencé il y a peu à planifié des opérations militaires dans le sud de la Syrie dans la région de Deera (à 45 km au nord de la capitale Amman). Ces opérations viseraient à créer une zone tampon pour renforcer la sécurité de sa frontière suite au chaos qui règne en Syrie après plus de 4 ans de guerre civile. Le pays vit actuellement l’une des périodes les plus dures de sa jeune histoire, cernée par les crises et les guerres. La guerre civile syrienne, au nord, depuis 2011, la guerre d’Irak à l’Est, depuis 2003, puis la montée fulgurante de Daesh entre l’ouest de l’Irak et le nord de la Syrie, ainsi que les problèmes récurrents Israélo-Palestiniens depuis 1948, en font une zone agitée.

En 1923 la Jordanie était une monarchie sous contrôle britannique installée par les Anglais, suite au démembrement de l’empire ottoman et aux accords secret Sykes-Picot de 1916. Ces accords, via la SDN, ont donné des mandats aux Français et aux Anglais pour accompagner ces États vers l’indépendance. Les Français recevront le Levant (Bilad A’Cham) avec « la Grande Syrie’ et créeront le Liban pour les Chrétiens syriens. Les Anglais auront mandat sur la Palestine et l’Irak. Ces terres seront divisées pour établir un foyer national juif en Palestine, puis un État palestinien, toujours en gestation. L’Émirat de Transjordanie, ancêtre de la Jordanie moderne est créé entre la Palestine originelle et l’Irak. La Jordanie a toujours vécu depuis son indépendance en 1946 dans un environnement hostile et complexe. Cela ne l’a pas empêchée, malgré de maigres ressources et sans pétrole, d’être un des pays du Proche-Orient sachant le mieux s’adapter aux contraintes données. Le Royaume a acquis, au fil des ans, une capacité de résilience qui lui a permis d’être considéré par de nombreux experts et observateurs comme un havre de paix et de stabilité, discret, dans une région marquée par les conflits, depuis la naissance des États moderne du Proche-Orient.

Mais cette stabilité et cette tolérance reconnue semble mise à mal avec les derniers développements de la guerre de en Syrie. Nous allons essayer d’éclairer dans cette brève analyse les divers facteurs tant politique, sociaux, qu’économique et militaire qui contribue à cette stabilité dans un environnement aussi instable et des plus volatile.

I/Facteurs Politiques & Sociaux :

Petit État du Proche-Orient de 89.320 km2, dépourvu de pétrole, avec un accès à la mer Rouge large de 27 km seulement, la Jordanie voit depuis mars 2003 (cf : guerre d’Irak) et depuis février 2011 (cf : guerre civile syrienne) un flot ininterrompu de réfugiés venir s’abriter sur son sol. La population jordanienne est de 6.459.000 d’habitants. A cela il faut ajouter 700,000 réfugiés Irakiens déjà absorbés par le pays et 618,508[1] réfugiés syriens. Le total des réfugiés représente 1,3 millions de personnes soit 20 % de la population totale. Avec un tel afflux depuis dix ans les « Jordaniens de souche », les bédouins et les premiers réfugiés palestiniens de 1948, nous reviendrons sur cette notion, se sentent « dépossédés » de leur pays », selon la chercheuse de l’IFPO Hana Jaber. Dans la société jordanienne ce sentiment diffus crée des tensions au niveau local mais également au niveau international et régional. En effet de par sa taille et son positionnement géographique, la Jordanie se trouve au carrefour des principales voies de communication du Proche-Orient.

A son désavantage : elle n’a que peu de ressources et n’a pas de pétrole. L’eau est rationnée dans les grandes villes où elle est distribuée une fois par semaine. Seul le Nord-Ouest du pays, la région d’Ajloun, est verte, le reste n’est que désert (plus de 90 % du territoire jordanien est constitué de déserts). De plus, durant la deuxième guerre du golfe – initiée par Georges.W Bush – la Jordanie a souffert des effets économiques collatéraux dut à l’invasion américaine : renchérissement des importations de pétrole en provenance d’Irak, celui du coût des importations en général et une baisse du nombre annuel de touristes. Cela a engendré une augmentation du coût de la vie dont les premières victimes furent les jordaniens bénéficiant de faibles revenus, 150 JD (210 $) représentant le salaire minimum du pays. En 2011, lors des soulèvements liés au printemps arabe, la Jordanie n’a pas fait exception, elle a aussi eu des manifestations, à Amman et dans les grandes villes du pays. Contrairement à d’autres pays arabes les manifestations en Jordanie se sont déroulées dans le calme. Les manifestants n’ont pas réclamé le départ du roi, mais des réformes économiques, politiques et le départ du premier ministre – Samir Rifai. Lors de ces manifestations le seul parti réellement structuré et au-delà des clivages tribaux se révéla être le Front d’Action Islamique, la branche politique des frères musulmans en Jordanie. Il est arrivé à fédérer une réelle opposition contre la corruption et l’augmentation du coût de la vie.

La Jordanie a dû et doit faire face à des groupes extrémistes et ce, dès les années 70 avec la tentative de prise de pouvoir des fédayins palestiniens de Septembre Noir. Il y eut également le triple attentat perpétré par des Irakiens en 2005 qui fit une centaine de victimes. De nombreuses manifestations qui regroupent en général une centaine de personnes issues des milieux extrémistes ont lieu notamment dans la ville rebelle de Maan (sud). Notons également la présence de cellules dormantes de Daesh qui chercheraient à déstabiliser l’État jordanien et à commettre des attentats. Ces groupes extrémistes ainsi que le Front d’Action Islamique se servent d’éléments défavorables, tels le taux élevé de chômage 12.2%, l’augmentation exponentielle du nombre de réfugiés (plus de 1.3 million) et les tensions, internes au royaume, pour tenter de changer le mode de gouvernement. Cela est partiellement lié à nouvelle approche du gouvernement qui consiste à combattre l’islamisme depuis le “11 septembre jordanien”, ce triple attentat, qui fit une centaine de morts pour la plupart Jordaniens, frappa trois hôtels de luxe à Amman. Il fut signé Al Qaida, l’attentat avait pour but de « punir » la politique étrangère pro-occidentale du roi Abdallah II. Le Front d’Action Islamique, est depuis toujours le parti d’opposition en Jordanie. Toléré par le roi Hussein, les relations d’opposition entre ce parti et le gouvernement jusqu’à 2005 étaient qualifiées de loyales. En effet le parti d’action Islamique est davantage proche, selon Curtis Ryan du CETRI, « des courants réformateurs et modérés que des tendances révolutionnaires, radicales et militantes ». Mais cette opposition « loyale » s’est confrontée plusieurs fois au roi Hussein, père d’Abdallah II, notamment lors de l’accord de paix de 1994 avec Israël. Dès 1989, suite à des troubles, l’État se lance dans une politique de démocratisation, les premières élections ont lieu. Cette politique d’ouverture et pro-occidentale est jugée inadéquate par l’opposition islamiste. Des groupes d’opposition plus radicaux que le parti d’action islamique sont créés et critiquent ouvertement la politique pro-américaine de l’État jordanien. Cela a abouti à l’équivalent d’un 11 septembre pour la Jordanie. Longtemps les groupes extrémistes ont été contrôlés et continuent de l’être par les services de sécurité, les « Mukhabarat », mais les attentats de 2005 ont rappelé au moins en partie la fragilité sur laquelle repose l’État jordanien.

En effet le pouvoir du roi et l’autorité de l’État reposent sur un équilibre précaire d’alliances tribales. Cette construction « artificielle » qu’est la Jordanie, pourrait selon ce que nous avons dit plus haut sombrer facilement par la conjonction d’une situation intérieure tendue et une situation extérieure instable. Les zones frontalières Nord et Est sont sous pressions avec la présence grandissante de groupes rebelles syrien et de groupes radicaux comme Daesh ou Al Nosra.

Cela serait toutefois sans compter sur l’alliance stratégique Jordanie/États-Unis ainsi que celle des pays occidentaux et Israël après 1994. Ainsi, pour la région et les occidentaux, la Jordanie est vue comme un exemple de modération et de stabilité. Les États-Unis dès 1949, début de leurs relations avec la Jordanie, ont cherché à soutenir cet effort de modération et de paix, en attribuant au pays l’aide fournie par l’agence américaine de développement USAID. Le montant annuel de cette aide en 2008 s’élèvais à 660 million $, le plafond de cette aide a d’ailleurs été relevé en 2015 par le sénat américain.

La monarchie et la structure étatique de la Jordanie sont récentes et proviennent des Anglais. L’armée fut formée jusqu’en 1956 par les anglais sous le commandement de John Glubb Bagot dit « Glubb Basha ». Le Roi Abdallah II est citoyen anglais par sa mère Antoinette Avril Gardiner, seconde femme du roi Hussein. Sa tante américaine d’origine syrienne Lisa Najeeb Halaby est devenu la reine Noor de Jordanie. La monarchie a donc longtemps oscillé entre occidentalisme et arabité du fait de l’histoire politique du pays et de la famille royale. Pour les couches les plus pauvres de la population cette monarchie apparaît comme dévoyée et vendue aux américains. Pour les couches les plus traditionnelles (les tribus bédouines) les sentiments vis-à-vis du roi oscillent entre un attachement très fort pour une famille bédouine et un certain refus du modernisme que le roi essaie d’introduire dans la société.

L’équilibre est d’autant plus précaire que le pouvoir repose sur une mosaïque de tribus bédouines traditionnelles qui soutiennent le pouvoir et participent à la vie politique. Par ailleurs l’arrivée des premiers réfugiés de Palestine en 1948, a permis de peupler un territoire largement sous-peuplé. Mais contrairement aux pays arabes voisins, la Jordanie a accordé la citoyenneté à l’ensemble des réfugiés. Se méfiant un peu de ces nouveaux arrivants, et pour ne pas éroder le soutien traditionnel des tribus bédouines, la royauté a fait en sorte que les postes dans l’administration et les forces de sécurité restent aux mains des bédouins, qui représentent environ 30 à 40% de la population. Les Palestiniens qui représentant environ 60 à 70% se répartissent dans le secteur privé et industriel. Ici deux problèmes émergent : un, assurer la loyauté de l’armée et des services de sécurité envers la monarchie ; deux, empêcher que la Jordanie devienne de facto un « l’État Palestinien » (l’idée soutenue par la droite Israélienne pour justifier la colonisation en Cisjordanie). Cette répartition plus ou moins visible des secteurs d’activités a permis un certain équilibre social et politique. D’un point de vue religieux la population est majoritairement musulmane sunnite. La minorité chrétienne représente 8 % de la population. Actuellement les communautés religieuses vivent en bonne entente même si la pression islamiste engendre au sein du royaume un sentiment diffus d’insécurité parmi la minorité chrétienne. A l’extérieur du royaume ce sentiment d’insécurité est dû aux guerres en Irak et en Syrie et à la pression de Daesh. A l’intérieur, la poussée des islamistes fait que les Chrétiens sont plus nombreux à partir s’ils le peuvent. Dans les anciennes villes chrétiennes telles que Madaba (qui conserve de nombreuses mosaïques et églises des débuts de l’ère chrétienne), la population musulmane est sans doute maintenant majoritaire.

La royauté jordanienne se considère comme la garante de la conciliation et de la tolérance au sein des pays arabes. Le frère de l’ancien roi Hussein, le prince Hassan dirige d’ailleurs un organisme chargé de promouvoir le dialogue entre les religions. Nous pouvons en voir un exemple avec l’illustration 1. Avec l’arrivée récente de nombreux réfugiés, liée au conflit syrien, cette harmonie tend à se dissoudre, un racisme anti-syrien se développe parmi les populations les moins aisées. Au plan intérieur, des problèmes de répartition des ressources et des emplois avec un taux de chômage supérieur à 12 % font que les jordaniens de souche, les bédouins et maintenant les premiers réfugiés palestiniens de 1948, se sentent dépossédés de leurs pays et de leur emplois. Cela crée des tensions entre Syriens et Jordaniens difficilement gérables dans la situation actuelle marquée par des affrontements entre forces de sécurité et réfugiés à Zaatari.

II / Facteur Militaire

La posture militaire de la Jordanie, dans un environnement régionale où elle doit faire face à la guerre en Syrie et à la déstabilisation de l’Irak, est une approche dite défensive. Membre de la coalition anti-Daesh, son territoire sert de base arrière à diverses organisations internationales et de base d’entraînement aux forces spéciales occidentales, que ce soit pendant les conflits irakiens ou syriens. La Jordanie cherche à maintenir un certain équilibre tout en continuant à bénéficier du soutien militaire américain et français. A ce propos elle a dernièrement acceptée le déploiement d’avion de combat français sur son sol. Elle ne souhaite pas s’impliquer d’avantage. En effet une plus grande implication de sa part aurait pour effet d’entraîner, sans doute des attentats terroristes de groupes extrémistes radicaux. Mais cet équilibre semble être remis en cause, et cela pour deux raisons : Un, le meurtre du pilote jordanien, Maaz Al Kasasabeh brulé vif en février 2015 par Daesh a provoqué l’effet inverse attendu à savoir un soutien massif de la populaire à l’encontre des terroristes ; Deux, l’instabilité en Syrien et l’afflux massif de réfugiés sur le sol Jordanien pousse petit à petit l’armée à réfléchir à une intervention dans le sud de la Syrie de manière a créer une zone tampon pour soulager la frontière Nord du royaume. Notons également que le très conservateur premier ministre d’Israël Benyamin Netanyahou à annoncer qu’Israël soutiendrait la Jordanie en cas d’attaque de Daesh.

Les États-Unis sont le premier fournisseur d’armes de la Jordanie. En 1996, les deux pays ont signé un accord bilatéral de coopération militaire. Selon les termes de cet accord, la Jordanie peut bénéficier des surplus militaires américains. Elle aurait reçu en 2013 par le biais de l’agence USAID l’équivalent 853 million $ d’aide militaire. A ce titre, elle entretient une flotte de 80 chasseurs F-16, des hélicoptères Black-Hawk et des batteries de missiles Patriot. Le gouvernement américain a également soutenu la construction du King Abdullah II Center for Special Operations Training, un centre d’entraînement spécialisé dans la lutte antiterroriste. Mais pour ne pas dépendre entièrement des subsides américains l’armée jordanienne a confié l’entraînement de ses forces spéciales au Commandement des Opérations Spéciales Français (le COS). Le 16 avril 2014, l’armée de l’air a détruit un convoi le long de la frontière Syrienne prouvant son efficacité et sa réactivité concernant le contrôle de ses frontières. Contrairement au Liban notamment lors d’affrontements à Tripoli qui ont opposé l’armée libanaise à des rebelles syriens et à des partisans du régime de Damas.

L’armée jordanienne doit faire face une augmentation des menaces liées au terrorisme plutôt qu’à des menaces classiques. Elle a récemment déployé des unités supplémentaires le long de la frontière irakienne, et augmenté sa présence aux check-points sur les grands axes de pays ainsi que dans la capitale Amman. Comme nous le voyons la Jordanie est fortement dépendante de ses accords de défense avec l’étranger pour assurer un haut niveau de protection face aux agressions extérieurs.

III / Économie

La situation économique de la Jordanie est marquée par des faibles ressources, tant industrielles, qu’agricoles et énergétiques. La Jordanie subit de plus les aléas de la crise financière mondiale et du printemps arabe qui la frappe de plein fouet depuis 2011. Il faut également ajouter les revendications sociales de la population, dont 30 % vit sous seuil de pauvreté, mais malgré cela la situation reste stable. En terme général et malgré la crise l’économie jordanienne a un taux de croissance de 3% avec un taux de chômage de 12 %. La Jordanie « reçoit un soutien financier important de la part de ses partenaires : FMI, BM, Etats-Unis, Arabie-Saoudite, Qatar UE, Japon, France » d’après M. le conseiller économique de l’ambassade de France en Jordanie. La Banque mondiale quand a elle soutien des programmes d’aides aux populations comme le programme « Jordan Now » qui vise à offrir des opportunités d’emplois et à améliorer les conditions de vie de la population. La Jordanie a une agriculture très dépendante des disponibilités en eau et, malgré les efforts méritoires (traitement et réemploi des eaux usées, irrigation au goutte à goutte), la surface d’exploitation se limite à la vallée du Jourdain et aux plateaux qui la dominent, d’Ajloun au Nord, à Amman au centre du pays. La Jordanie exportent toutefois des fruits et légumes vers le Golfe. Une industrie agro-alimentaire se développe (lait, huile, pêche) mais des importations sont nécessaires. La potasse et les phosphates représentent un apport de devises non négligeable, l’uranium pourrait devenir aussi exportable, mais le pays n’a pas de ressources énergétiques et importe pétrole, électricité et gaz.

L’industrie est limitée, sauf dans le secteur des matériaux de constructions, Lafarge possède plusieurs cimenteries dans le pays au sud d’Amman. Une industrie de produits manufacturés par le biais des QIZ, Qualified Industrial Zones s’est également développée avec le renforcement des relations bilatérales entre la Jordanie et les Etats-Unis. Dans ces QIZ le gouvernent jordanien autorise l’entrée sur son sol de produits venant d’Asie qui sont transformés en produits finis puis exporté vers l’Europe ou les États-Unis sans droits de douane.

Quant à la ressource touristique, importante pour le pays (Pétra, Mer Morte, Aqaba), elle est en chute libre ces dernières années du fait de la crise syrienne, de l’instabilité égyptienne et du maintien d’une insécurité en Irak.

Toutefois grâce à sa stabilité politique, la Jordanie maintient une bonne activité dans le domaine des services l’Arab Bank est la plus grande banque arabe (cette dernière a été accusée de financer le terrorisme), les assurances, le transport, l’activité de représentation d’entreprises et de redistribution régionale jouent un grand rôle.

Le développement économique du pays a suivi sa démocratisation, dans les années 80. D’essence très libérale, la politique du gouvernement a amené la privatisation générale de l’industrie et des services. La Jordanie est donc considérée comme « émergente » avec une économie assez variée, mais elle reste très dépendante de ses échanges avec l’extérieur et de l’assistance internationale.

Conclusion :

Malgré une stabilité politique qui s’est jusqu’à présent confirmée, une économie relativement solide et une armée bien entraînée, la Jordanie se trouve dans l’œil du cyclone, cernée par les crises. Elle résiste grâce aux choix audacieux, pragmatiques, de ses dirigeants, aux alliances stratégiques qu’elle a su tisser à travers le temps avec ses partenaires arabes, occidentaux et israéliens. Elle a su faire une sorte de synthèse entre l’Orient et l’Occident, mêlant les identités arabe multiples : bédouins, palestiniens, musulmans et chrétiens avec un mode de fonctionnement à l’occidentale. L’État et l’économie jordanienne se sont adaptés d’une façon remarquable au monde moderne, globalisé, depuis les réformes de la fin des années 80. En s’intégrant à la plupart des organisations internationales et en jouant le jeu des occidentaux elle a su tirer son épingle du jeu et ainsi éviter la contagion des crises à ses frontières. En adoptant une posture plus pragmatique que ses voisins arabes, en matière de politique étrangère et économique, elle a su tirer profil de ses faibles ressources pour s’affirmer comme un État stable et pouvant servir d’intermédiaire dans le règlement de crises régionales. Mais vu sa position sur la carte et les contraintes internes auxquelles elle doit faire face quotidiennement peut-elle faire autrement ? Cet État qualifié par les résidents occidentaux de havre de paix au milieu de la tourmente est certes stable et contredit les prédictions de nombreux géopoliticiens et experts de la région. La question est : pour combien de temps encore, Insha Allah ?

Marc-Henri SAILLARD © MEDEA (Belgique)

Marc-Henri Saillard est président de l’association Limes Arabcius, il travaille pour l’Institut européen de recherche sur la coopération euro-méditerranéenne et euro-arabe.

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